12 years a slave : époustouflant
Publié le 21-01-2014 16:28:43 Modifié le 05-04-2019 16:32:17
Le réalisateur anglais Steve McQueen décrypte froidement l’esclavagisme aux USA dans ce grand film qui fera date.
Après s’être attaqué à la grève de la faim dans les geôles irlandaises, à l’obsession du sexe dans la société contemporaine, Steve McQueen filme l’esclavagisme. Sa matière brute, c’est la haine, l’inhumanité, la corruption, la violence. La terreur aussi, celle de Solomon Northup, un noir américain du nord des États-Unis, libre, penseur, joueur de violon qui, un jour, va se faire kidnapper, enchaîner et traîner de force dans le sud du pays.
Dans les années 1840, l’esclavagisme fait rage. Cet homme libre, dans le Nord, devient esclave dans le Sud. Admiré par ses pairs dans sa petite ville de l’État de New York, il est traité comme une bête à La Nouvelle Orléans, vendu comme un vulgaire chien.
Pendant 12 ans, il va vivre l’horreur du système esclavagiste, au premier rang : battu, humilié, mutilé, formaté. Histoire singulière d’un homme libre qui devient du jour au lendemain enchaîné, sans voir sa femme et ses enfants.
Celle de Solomon Northup est vraie. Son autobiographie a servi de base à Steve McQueen. Comme un peintre qui décrit les abominations avec ses plus belles couleurs, le réalisateur anglais pose un cadre magnifique à cette histoire tragique. Photographie majestueuse, couleurs magnifiées, cadrages larges d’une nature luxuriante, on se croirait presque dans un tableau impressionniste où l’inhumanité serait concrètement incarnée.
Il prend son temps. Ce plan fixe colle à la mémoire, comme un mauvais rêve : Solomon s’appelle Pratt, son nom d’esclave. Parce qu’il ne s’est pas plié à l’autorité de son maître, il se retrouve la corde au coup, attaché à une branche, devant les dortoirs. Un contre-ordre le sauve de la mort, reste la punition de sa rébellion. La corde reste autour de son cou, ses pieds touchent à peine le sol boueux, la caméra continue à tourner, les autres esclaves sortent, font comme si de rien n’était, un des maîtres le surveille, la scène dure, la souffrance de Solomon explose à l’écran.
Pas un bruit ne vient troubler le châtiment ignoble. Le malaise se transforme en dégoût, celui de vivre de l’intérieur le système esclavagiste.
Quand Tarantino filmait un homme en pleine revanche, un justicier, dans Django unchained, Steve McQueen met à nu un héros déchu, solitaire, abandonné. À l’opposé d’un Jamie Foxx arborant sa fierté comme étendard, Chiwetel Ejiofor offre un personnage rongé par la misère qui l’entoure et le touche, la tête basse, sans repère. Comme la Liste de Schindler, l’œuvre de Steve McQueen décrit méticuleusement la machine à broyer les enfants, les femmes et les hommes. Voir l’esclavage dans toute sa cruauté est une expérience éprouvante, nerveusement, moralement. 12 years a slave s’inscrit dans la mémoire.
Benoît Renaudin
NOTE : ****
Drame historique de Steve McQueen. Amérique. Durée : 2 h 13. Avec Chiwetel Ejiofor, Lupita Nyong’o, Michael Fassbender, Benedict Cumberbatch, Paul Dano.
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Les films toujours en salle
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LES BRASIERS DE LA COLÈRE **
Drame sombre et sinistre, à l’image de la ville qu’il filme, le dernier film de Scott Cooper trace le quotidien de deux frères (un sorti de prison, l’autre revenu d’Irak) dans une Amérique rurale terne et minée par le chômage. Le pitch est classique, la mise en scène simpliste, mais Les Brasiers de la colère mérite d’être vu pour son incroyable direction d’acteurs : Christian Bale est magnétique, Woody Harrelson est grandiose… Pas révolutionnaire, mais une chronique sociale intéressante. A.G.
À COUP SÛR *
Après avoir été comparée à une limace au lit, Emma, une journaliste élevée dans le culte de la performance, décide de devenir le meilleur coup de Paris. Où certains cinéastes auraient pu faire rire avec un tel pitch, Delphine de Vigan rate son coup (et là, c’est sûr !) et accouche d’une comédie faiblarde et balourde. Les dialogues et les effets de style (comique de répétition) sont parfois à la limite de l’affligeant. On sourit deux, trois fois et on oublie. Pas franchement jouissif. A.G.
YVES SAINT LAURENT **
En 1957, le jeune créateur Yves Saint Laurent prend la tête de la maison Dior. À la même période, il rencontre Pierre Bergé, qui deviendra son compagnon, dans la vie, et dans les affaires. Dans son biopic autorisé, Jalil Lespert décrit la relation entre le torturé Yves et l’autoritaire Pierre dans une France en pleine mutation des années 50 à 70. On note la performance des acteurs, surtout celle de Pierre Niney, criant de justesse en Yves Saint Laurent. Un film fort malgré quelques longueurs. C.P.
NOTATION :
**** CULTEissime
*** TOPissime
** PASMALissime
* BOFissime
X NULissime
Catégories : Ecrans