Hellfest 2019 : un marathon d'enfer
Publié le 26-06-2019 12:00:59 Modifié le 19-07-2019 17:42:40
« On est bénis des Dieux... » Ben Barbaud, le big boss du Hellfest, avait le sourire pour cette nouvelle édition ensoleillée et caliente du festival ! Plus de 180 000 personnes sur 3 jours très chauds, 156 groupes, du metal et de la bonne humeur : le Hellfest a encore brillé pour sa 14e édition. On y était. Instant souvenirs après avoir peu dormi…
1) Encore des records
> Moins de 2 heures. C’est le temps qu’il aura fallu pour écouler les 55 000 pass 3 jours, lors de leur mise en vente.
> 25 millions d’euros : le budget du Hellfest (toujours organisé par une association de loi 1901!). C’est le plus gros de France.
> 215 € : le prix d’un pass 3 jours.
> 27 millions d’euros : le chiffre d’affaires du Hellfest
> 70 : le nombre de nationalités présentes lors du festival
> 7 500 : la population de Clisson, la ville accueillant le Hellfest. Ben Barbaud, directeur du festival, a rappelé : » Il n’y a plus un habitant qui n’aime pas les festivaliers alors qu’il y a 14 ans, il n’y avait pas grand nombre à nous pifrer. Il y a une vraie histoire d’amour entre les Clissonnais et les festivaliers. »
> 15 000 litres : la consommation de muscadet durant les 3 jours
> 400 000 litres de bière écoulés l’an dernier. Va-t-on casser le record en 2019 ? Vivement les chiffres…
2) La polémique Manowar
Ce n’est qu’un Manorevoir… Le vendredi, MANOWAR, la tête d’affiche, a tout simplement quitté le site du festival le jour même, à quelques heures de son show. Bim. La nouvelle a refroidi de nombreux festivaliers, dont certains qui venaient spécialement… d’Amérique du Sud !
Pas contents mais connus pour être des divas, les slips en cuir (on parle de Manowar hein) sont restés flous quant aux raisons, laissant croire que l’organisation les avait empêchés de proposer l’énorme show qu’ils avaient promis (Rammstein, Iron Maiden ou Aerosmith n’ont pourtant jamais râlé les années précédentes, mais soit). Le directeur du Hellfest, quant à lui, est resté tout aussi flou, parlant de désaccords contractuels.
Désormais, Manowar se fait allumer sur les réseaux sociaux et les rumeurs courent de partout : le groupe aurait voulu faire ses balances avec une chorale sur un horaire déjà pris, ou dépasser la limite sonore autorisée en France, il aurait râlé à propos de la taille de la scène…
Au final, l’histoire se réglera probablement au tribunal. Rock ‘n’ roll…
3) Le « Disneyland » des metalleux : plein les yeux !
Visuellement, il est impossible de ne pas être subjugué par les infrastructures magnifiques du Hellfest.
Imaginez la chose : sur une vingtaine d’hectares, trônent six scènes différentes, une grande roue, une statue géante en l’honneur de Lemmy de Motörhead, une horloge géante (ainsi qu’une main gigantesque faisant le signe du metal), une forêt « muscadet », ou encore un hélicoptère crashé dans un espace pour se rafraîchir et un espace VIP/Presse avec fontaine de faux sang et bar en ossature…
Aussi dingue que sublime, aussi grandiloquent qu’hallucinant : un travail d’orfèvre !
4) Pouvoir aux « vieux » !
On ne va pas se mentir, les vieux groupes en ont encore sous la pédale. Cette année, on s’est pris une bien bonne claque avec KISS – sur qui on ne misait pas un kopek – et leur concert ahurissant. Potards poussés au max, les amplis du Bisou ont craché sec. Et la bande à Gene Simmons a fait le show : débauche d’effets visuels, confettis, vomi de faux sang, pyrotechnie et… survol de la foule en tyrolienne !
Et les autres « anciens » n’ont pas démérité : ZZ TOP a fait pousser la barbe des festivaliers en une heure chrono, le temps de balancer ses tubes jouissifs. Quant à LYNYRD SKYNYRD, il a fait ses adieux devant une foule impressionnante. Le rock sudiste du gang floridien n’a rien perdu de sa superbe. Surtout quand il envoie un « Simple Man » beau à pleurer ou un « Sweet Home Alabama » ! Et que dire de ce rappel qu’on n’attendait pas (le groupe ayant dépassé son créneau) constitué de « Free Bird » et son solo mythique : ju-bi-la-toi-re. Après avoir entendu ce titre en live, croyez-moi que l’auteur de ces lignes peut mourir tranquille !
5) Les adieux
L’édition 2019 du Hellfest a également été marquée par le dernier concert des Américains de SLAYER. Les rois incontestés du thrash metal signaient là leur ultime passage français, pour cette tournée d’adieux. Set list monstrueuse (« Disciple », « Season in the abyss », « Hell Awaits », « Gemini », « Evil has no boundaries », « Angel of death », etc.), hargne dingue, concert brutal à souhait, scène envahie par une immense toile aux couleurs de l’Enfer et des rideaux de flammes…
Slayer a offert l’un de ses meilleurs concerts et tire sa révérence de manière sublime.
6) Ultra Vomit : la France brille (et rit)
Le Hellfest avait choisi cette année de mettre en place un vendredi spécial scène française sur la Mainstage. De KLONE à MASS HYSTERIA en passant par les énormes GOJIRA. Mais c’est ULTRA VOMIT qui, une nouvelle fois, a enflammé les milliers de métalleux. Jouant à domicile, les Nantais ont balancé leur metal parodique hilarant, dévoilant une Maïté peinturlurée en chanteuse de black metal, faisant venir une chorale gospel et un Jésus en maillot de foot qui distribue des hosties derrière une scène où apparaît un immense logo Jésus, façon ACDC. Sans oublier, bien sûr, la venue d’un faux Calogero (sur leur titre « Calojira ») qui aura berné tout le monde !
7) Metal maori et alerte aux fous
Dimanche, 10 h 30 du matin, la tête enfarinée, l’oeil bovin et l’haleine chargée de relents de la bière de la veille, on se dirige vers la Mainstage pour jeter une oreille sur ALIEN WEAPONRY. Bon, le nom est laid, le logo tout autant. Et pourtant sur scène, ces Néo-Zélandais vont mettre la torgnole matinale grâce à du metal maori ! Sur de gros riffs rappelant les Soulfly et Sepultura époque « Roots », les jeunôts alternent des chants maoris, traditionnels ou metal. Chouette !
Dans la foulée, on a assisté à INSANITY ALERT. Sur scène, ces Tyroliens (oui, oui) sont déchaînés. Oeuvrant dans le thrash crossover, les riffs s’enchaînent, rapides et véloces, tranchants et imbibés de bière et d’herbe qui fait rire. Heavy Kevy, le chanteur, balance vanne sur vanne et semble complètement torché alors qu’il n’est qu’onze heures du mat’. Dégaînant une pancarte avec la photo de David Guetta, il hurle « Pourquoi David Guetta est encore vivant ?? ». Derrière, sont diffusés des messages comme « Je m’appelle Mireille ». Pourquoi ? On ne sait pas. Mais les Autrichiens ont filé le sourire à tout le monde ce matin-là.
8) Folie, émotion et vikings
Qui d’autre a-t-on vu ? Les tarés de PUNISH YOURSELF (prenez de la grosse techno hardcore et mélangez avec un mur du son punk et metal), le « super-groupe » DEADLAND RITUAL (avec le bassiste de Black Sabbath !), ou encore l’instant émotion avec EAGLES OF DEATH METAL. Le groupe connu pour les tristes raisons que l’on sait, était de retour sur les terres françaises après avoir été banni suite aux paroles polémiques du chanteur après l’attentat. Le Californien arborait cette fois un badge « Life for Paris », du nom de l’asso des victimes et s’est fendu d’un « je vous aime » en français.
Le dimanche, on a aussi aimé le thrash monumental de DEATH ANGEL, le death-thrash ultra technique mais un peu m’as-tu-vu de REVOCATION (des musiciens qui ne se prennent pas pour des manches, ouarf), le black metal grec et poisseux de LUCIFER’S CHILD, le death culte d’IMMOLATION ou de VLTIMAS (regroupant des musiciens de Mayhem, Cryptopsy et Morbid Angel !).
Enfin, petit bonus avec SKALD, la nouvelle sensation de la scène musicale viking. Avec costumes et instruments traditionnels (lyre, talharpa, etc.), ces Français pratiquent une musique nordique, envoûtante, percutante, au lyrisme prononcé, piochant ses influences dans la mythologie scandinave, le vieux norrois, les légendes islandaises. À en voir l’immense foule massée pour les voir, Skald a confirmé que son ascension était loin, très loin d’être terminée.
9) Les deux claques du festival
Il aura suffit d’assister au concert terrifiant de CULT OF LUNA pour se prendre l’une des plus grosses baffes du week-end. Show dantesque, jeu de lumières confinant au sublime, voix surpuissante, transcendée par un mur du son et… deux batteries ! L’effet est fou et la musique pachydermique des Suédois aura fini notre samedi en beauté.
Retenons aussi EMPEROR, dimanche, qui nous a autant écrasé qu’un bulldozer croisé avec un mammouth :musique froide, technique, complexe, épique, aux envolées explosives ou symphoniques, les pionniers du black metal norvégien ont brillé.
10) L’événement Tool pour finir
Autant dire qu’après 12 ans d’absence en France, la venue du groupe légendaire TOOL était plus qu’attendue, le dimanche à 0 h 30. D’autant que le Hellfest essayait d’avoir la formation depuis bien des années.
Au final, du grand spectacle, des écrans géants enveloppant la scène de mini-films psyché et envoûtants. Envoûtant, comme la voix de Maynard James Keenan, véritable OVNI, pépite maniant les variations comme personne. Musique dense, intellectuelle, mélodieuse et mélodique, aussi mystérieuse que le groupe en lui-même. Un instant rare, un instant magique. Idéal pour finir un week-end extraordinaire.
Textes et photos : Aurélien Germain