Immo : A quoi servent (encore) les agences ?
Publié le 12-05-2016 12:15:37 Modifié le 12-05-2016 12:15:37
Aujourd’hui, les maisons fleurissent sur Le Bon coin et la moitié des ventes auraient lieu de particulier à particulier. Pourtant, les agences continuent de convaincre acheteurs et vendeurs. Quelle est leur force ?
« Les agences, elles se gavent. Ça sert à rien, et ça coûte trop cher ! » Comme l’antiquaire, l’homme politique, le chauffeur de taxi (et le journaliste!), l’agent immobilier est souvent rhabillé pour l’hiver au fil des discussions. Sur les 2 millions de Français qui projettent d’acheter dans les six mois, la moitié évite la case agence. Cléo l’a zappée naturellement : « Quand ma propriétaire a cherché à vendre son appartement à deux pas de la rue Nationale, j’ai sauté sur l’occasion. J’étais prioritaire et elle en demandait un prix très raisonnable. »
Le bouche-à-oreille ou les transactions entre proches ont toujours existé, représentant 10 % du marché, mais Internet offre une vitrine de taille XXL aux petites annonces et Le Bon Coin est devenu le terrain de chasse n° 1 des acheteurs. Et des vendeurs. Stéphane est un irréductible de la transaction de particulier à particulier : après un premier appartement, c’est sa maison qu’il a acheté en direct et vient de mettre en vente sur Le Bon Coin. Il l’a estimée lui-même, en comparant avec des biens similaires « Je me mets à la place de l’acheteur, 15 000 euros de commission, c’est énorme. Alors à quoi bon lui faire payer juste pour visiter ? »
Après un mois, il a reçu 20 acheteurs potentiels et une offre dès la première visite, qu’il a jugé trop basse. Il avoue avoir surestimé sa maison en prévision de négociations et vient de la confier aussi à une agence en mandat simple, pour multiplier ses chances. Bien sûr, un particulier peut facilement mettre sa maison en vente et la faire visiter. Mais l’agent ne fait pas que tenir les clés. Tous les professionnels interrogés ont vu des déçus pousser la porte de leur agence : « Un monsieur est venu me voir après deux compromis signés et rompus pour défaut de financement », se rappelle Samuel Machefer, gérant de M&B et président de l’AMEPI 37. Dans une autre agence, c’est un couple qui trouvait trop compliqué de juger le sérieux des acheteurs et a préféré déléguer après 10 visites. Là où un vendeur hésite à fouiller, l’agent va vérifier le dossier de l’acheteur.
Et celui du vendeur : « Dès le mandat, je demande l’acte de propriété, les diagnostics… explique Anne Dubois, de l’agence ORPI Prébendes. Dans le cas d’extensions ou de travaux non déclarés (ce qui est plus fréquent qu’on ne pense), on incite le propriétaire à se mettre en conformité avec la loi. » Un travail qui évitera de mauvaises surprises.
Comme Stéphane, Valérie était bien décidée à éviter des frais et pensait se débrouiller avec Le Bon Coin. Son conjoint, lui, préférait les agences : « Il trouvait les prix plus justes. Il a particulièrement accroché avec un agent ; on cherchait depuis plus d’un an quand il a rentré une maison qui correspondait à nos critères, il a appelé mon conjoint en premier, qui n’était pas trop chaud pour la visiter, l’agent a insisté, l’a convaincu de faire un saut dans la journée. On a fait une offre dans l’heure. Et au prix demandé. »
Pour elle, l’agent a montré toutes ses compétences : alerter son client et lui donner des conseils pour faire une offre raisonnable. Si elle souhaitait, au début de son projet, économiser une commission, elle reconnaît que la dépense était justifiée : « L’agent a passé un temps de dingue avec nous, il la méritait largement. »
ENSEMBLE, ON EST PLUS
FORTS : LE FICHIER AMEPI
L’union faisant la force, pour offrir plus de choix aux acquéreurs, certaines agences mettent en commun leurs mandats via le fichier AMEPI. Ici, le vendeur confie son bien à une agence et celle-ci l’inscrit au fichier, chaque agence adhérente peut alors le proposer à ses propres clients. En cas de transaction, les deux agences se partagent la commission. Tout le monde y gagne : le client, qui garde un seul interlocuteur et le professionnel, qui multiplie ses chances de conclure. La pratique existait déjà depuis longtemps mais de façon informelle. En Indre-et-Loire, 50 agences partagent leurs portefeuilles. L’idée, excellente, a malgré tout laissé Emmanuel et Caroline sur leur faim. Pour trouver plus vite, ils étaient prêt à payer les services d’un pro, bien conscients que le temps c’est de l’argent. Après 20 visites en 4 ou 5 mois, le couple trouve finalement une maison à Saint-Avertin, via Le Bon Coin : « En revanche, à refaire, on ferait plus confiance aux agents pour aller vers des quartiers auxquels on ne pensait pas. » La connaissance du terrain reste la grande force des pros. « Rien ne remplacera une visite, rappelle Anne Dubois. D’ailleurs, beaucoup de vendeurs viennent nous voir pour avoir une estimation plus juste avant de mettre leur bien sur Le Bon Coin. On ne peut pas juger la valeur d’un bien à sa bonne mine extérieure ou au nom de la rue. »
Étage, orientation, cuisine aménagée, taille de l’extérieur, proximité de telle école… le prix varie selon une multitude de détails que le vendeur ne voit pas toujours. Détaché de l’appartement de la maison qu’il vend, l’agent est aussi plus objectif, souligne Samuel Machefer. Il sait ce qui inquiète son acheteur, le séduira ou le fera fuir. À lui de rassurer en montrant les points positifs. La résistance s’organise aussi sur Internet. Le site Bien’ici est l’une des dernières initiatives lancée par les agences pour coller au près des souhaits des acheteurs. Il propose des recherches géolocalisées. C’est bluffant de facilité et d’attractivité : en deux clics, on se voit déjà dans un T8 de 267 m2 près de la Cathédrale. Si vous voulez absolument habiter à moins de 100 m de votre bar à vin préféré, rien de plus simple, Bien’ici est là et vous indique tous les spots : bistrot, hôpitaux, écoles… Ce qu’on appelle en jargon de chasseurs d’appartement « les commodités ».
Là réside la force de Bien’ici : le site a cartographié des quartiers entiers en 3D et modélisé plus de 200 monuments. Résultat : on s’y croirait et c’est plus joli que du Google view. S’il a été bouleversé par la généralisation d’Internet, pour Anne Dubois, le secteur immobilier existe difficilement en 100 % virtuel : « C’est du concret, notre maison. Le contact physique est important. » Même quand elle n’a rien à faire visiter, elle envoie un texto de temps en temps à ses clients pour leur montrer qu’elle garde leur demande en tête. Une petite attention que n’aura pas LogicImmo. « On peut donner des contacts, faire visiter le quartier à un primo-arrivant, c’est un métier humain, » confirme Samuel Machefer.
Et quand les gens ne se parlent plus, l’agent a un rôle clé. Divorce saignant, succession où chacun tire à hue et à dia, exigences extravagantes des futurs propriétaires… l’agent peut se doubler d’un diplomate. Il prend du recul, rassure les parties, fait l’intermédiaire, joue le rôle de filtre. « Le vendeur était très, très bizarre, il posait plein de questions indiscrètes, se rappelle Nathalie. J’étais soulagée que l’agent soit là et le cadre. »
>> Retrouvez notre spécial IMMO PROPRIO dans le numéro du 11 mai 2016 téléchargeable ICI ! <<
Catégories : News