SNCF : à l'intérieur de la salle de la crise
Publié le 05-07-2018 06:23:55 Modifié le 05-07-2018 06:23:55
Un train à l’heure, ça arrive. Un train qui a du retard, ça arrive. Un train qui est annulé, ça arrive aussi. Une multitude d’incidents peuvent perturber la circulation. Et, quand une crise se passe dans la région, c’est à la gare de Tours que cela se gère
« J’ai reçu un mail de Pascal. Il nous laisse pas le temps de réfléchir. Il applique jusqu’à Étampes. Je vais appeler l’astreinte voir s’il y a d’autres préconisations chez nous », lance Philippe Duret, se saisissant de son téléphone. Dirigeant régional à la circulation, ces mots sont destinés à son collègue Fabien Maitrot, dirigeant régional opérationnel, en charge de la mobilité.
Nous sommes dans la salle de crise de la SNCF située au deuxième étage de la gare de Tours. Des fenêtres, les voies sont visibles. Autour du grand bureau central cinq sièges. Pas un de plus. En temps de crise, seulement cinq personnes sont habilitées à entrer dans cette pièce.
Ce jour-là, ils ne sont que deux. La raison de cette petite effervescence est la suivante : l’abaissement de la vitesse sur la ligne Paris-Étampes. « Quand il fait chaud, la caténaire devient fragile. Si on roule trop vite, avec le contact du pantographe, on risque de tout casser », explique Philippe Duret. Mieux vaut ajouter dix minutes au temps de trajet qu’avoir une caténaire qui lâche. Tout deux sont en poste une semaine sur deux, sept jours sur sept et joignables 24h/24. En cas d’incident, ils sont systématiquement appelés et décident d’ouvrir la salle ou non. « Si on juge que ça monte en puissance, si on sait qu’il va y avoir un gros impact sur la circulation, le directeur de crise vient. Puis, au fur et à mesure, les autres astreintes vont se greffer », indique Philippe Duret.
L’essentiel de leur travail consiste à prévoir. Quand ils reçoivent une alerte météo, ils anticipent. Quand une grève est annoncée, ils anticipent. Mais « prévoir une crise n’est pas quelque chose de palpable », atteste Philippe Duret. Ce qui semble le plus important, ce sont les prévisions de durée.
« Le boulot le plus compliqué qu’on a, c’est de prévoir la fin d’incident. C’est ce que les usagers exigent », constate Fabien Maitrot. Sauf que, pendant la première demi-heure, difficile de savoir. Le temps que tout ce petit monde se mette en place, il y a un flottement. Un feu vient de passer au rouge. Qu’est-ce que ça veut dire ? Est-ce qu’une caténaire est tombée ? Un passage à niveau qui est ouvert ? « Il faut envoyer quelqu’un et que les informations nous remontent », explique Philippe Duret. « Une crise est bien gérée quand on a les bonnes informations », assure Fabien Maitrot. Plus la représentation de ce qui se passe sur le terrain est claire, mieux c’est.
UNE GROSSE CRISE PAR SEMAINE
Chacun a ce qu’il appelle un « outil opérationnel » chargé de relayer les décisions prises en salle de crise. Le centre opérationnel de la gestion de la circulation se trouve juste à côté. Il coordonne la circulation des trains sur la région Centre. Chaque table de régulation agit sur un secteur précis. « Toutes les lignes ne sont pas régulées, traduit Philippe Duret. Pour les petites lignes à voie unique, ce sont les agents de circulation dans les gares qui sont responsables de la circulation des trains. » Au centre, les lignes gérées sont celles où le trafic est important. Là où il y a plus de risques d’incident.
« 18 aussi, un département qui m’est cher », dit le régulateur de la table 3. Il ne manque pas d’humour. À moins que cela soit normal. Après tout, ils ont l’air d’avoir un langage bien à eux. S’en suit une suite de lettres et de termes difficilement compréhensibles. Encore plus quand toutes les tables parlent en même temps. « Hier, on a eu à gérer un feu de transformateur à proximité des voies vers Vierzon. Les circonstances ont fait que l’intervention des pompiers était rapide. Le courant a été rapidement rétabli. Cela aura duré deux heures. Mais quand les dégâts sont plus importants, on peut être sur une demi-journée. » Résultat : neuf trains supprimés et une vingtaine retardés.
« La plupart du temps, on est en opérationnel trois à quatre fois par semaine. On ouvre et on referme tout de suite », explique Fabien Maitrot. Par opérationnel, il faut comprendre que seul deux personnes se rendent dans la salle et évaluent la situation.
Environ une « grosse crise » par semaine est comptabilisée.
Textes et photos : Justine Brichard
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