Amour : quand le big love est un big business
Publié le 12-02-2020 07:52:11 Modifié le 11-02-2020 10:03:03
Les sites de rencontres ? Un vrai labyrinthe, où l’on s’en prend au porte-monnaie et à l’amour-propre des célibataires. Car sur le web ou dans la « vraie » vie, le coeur à prendre est un client. Embarquement immédiat dans le monde des pros de l'amour.
Les portions individuelles concurrencent allègrement les plats familiaux dans les rayons du supermarché, signe que le célibat est désormais un vrai marché. Célibataires, veufs et divorcés représentent en effet plus de 50 % de la population adulte de plus de 15 ans selon l’INSEE.
Or, quoi de mieux pour attirer les célibataires dans les filets de son commerce, que de leur proposer de rencontrer l’âme sœur ? Le site français de rencontres en ligne Meetic a ouvert la voie en 2001, dans un secteur aujourd’hui concurrentiel et segmenté. En 2019, on comptait ainsi plus d’une centaine de sites et applications en France.
Des généralistes Tinder ou Adopteunmec jusqu’aux plus spécialisés (religion, âge, secteur professionnel, extraconjugal…), le refrain est le même : dis-moi qui tu es, et je te dirais qui aimer… à condition d’ouvrir ton porte-monnaie ! Car si on s’inscrit gratuitement, l’accès à toutes les options est souvent payant.
Un beau pactole
Appâté par la possibilité d’une rencontre (d’un soir ou d’une vie), un quart des français a déjà tenté l’expérience. La seule garantie, c’est un beau pactole pour les entrepreneurs concernés. Au premier trimestre 2019, Tinder devenait ainsi l’application la plus rentable de l’histoire, avec 230 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Thierry, Tourangeau de 31 ans, fait partie des déçus d’internet : « Je payais 29 euros par mois sur le site, mais être devant mon écran ne m’aidait pas à sortir de ma réserve. Et j’avais peur de tomber sur des faux profils. » Il a donc opté pour une soirée pour célibataires, « plus conviviale que le virtuel ».
Aux commandes des soirées Air Célibat créées fin 2019 à Tours et Nantes, on retrouve William Nicolas, 32 ans. Pour le jeune entrepreneur, le succès est au rendez-vous, mais ce n’est pas un hasard : « J’ai mené une étude de marché, évalué le nombre de célibataires sur Tours-agglo, le nombre d’inscrits sur les sites de rencontres, testé autour de moi le concept, et j’adapte ma communication en fonction des profils déjà inscrits à la soirée ».
« Remettre au goût du jour le bal d’autrefois »
Lieu insolite, accueil personnalisé, jeux variés, apéro dînatoire et musique jusqu’au bout de la nuit : pour trente euros, William cherche à offrir une soirée qui sort de l’ordinaire à sa soixantaine de convives. Avec un objectif : « remettre au goût du jour le bal d’autrefois, pour aider les gens à se rencontrer. »
La rencontre « à l’ancienne », c’est aussi la spécialité de Patrice Huby, directeur de l’agence matrimoniale Fidelio Tours depuis vingt-deux ans. « Avant l’apparition des sites, notre travail était simple : les clients nous contactaient, et nous organisions les rencontres. Aujourd’hui, nous devons proposer plus, pour des personnes de tous âges qui sont déçues (voire abîmées) par leur expérience sur le web, ou qui ne souhaitent pas y avoir recours. »
On s’abonne donc pour un suivi au long cours. Patrice Huby aide son client à se poser les bonnes questions, en fonction de son passé amoureux et de son caractère, avant de l’aiguiller vers la bonne personne. Dernier couple marquant en date ? Une femme de 84 ans et son nouvel amoureux de 92 printemps, car il n’y a pas d’âge pour s’aimer… ni pour se marier.
Cahier des charges et marché
Et là aussi, des professionnels s’invitent à la noce. Depuis une quinzaine d’années, les wedding planners se chargent d’organiser ce grand jour. En Touraine, Noémie s’est lancée en 2016 avec son agence Mona Lisa. Son but : « trouver l’équilibre entre les envies des clients et leur budget, et après avoir établi avec eux un cahier des charges, je m’occupe de tout pour qu’ils profitent à fond de leur journée ! ».
Pour Pauline, mariée en 2019, le recours à une pro a permis de simplifier la logistique et de soulager tout le monde : « Nous ne voulions pas mettre à contribution nos proches, pour que tous vivent l’événement sans stress. » Rendons-nous à l’évidence : des mots comme « cahier des charges » ou « marché » ne sont pas romantiques, car l’amour est un enjeu commercial, n’en déplaise aux fleurs bleues. Mais cultivez cette petite étincelle en vous, qui déjoue toujours les lois du marché ! (cœur avec les doigts).
Maud Martinez