COP21 : est-elle vraiment si historique ?
Publié le 15-12-2015 13:38:31 Modifié le 15-12-2015 13:38:31
La COP21, c’est fini. Accord, il y a eu. Pour certains, il est historique, pour d’autres, il passe totalement à côté des enjeux. Quel est donc le vrai bilan de ce rendez-vous mondial ?
Du point de vue des pays, qui se réunissent chaque année depuis 21 ans et dont les négociations ont souvent échoué, comme lors de la COP15 à Copenhague, il est vrai que c’est historique. 195 pays qui s’accordent sur 29 articles, après un marathon de 2 500 réunions en 13 jours et 13 nuits, après avoir mangé 7 000 pommes (apparemment pas bio mais à l’effigie de la COP21), après avoir bu plus de 70 000 cafés dans 25 000 écocups, après avoir généré 20 tonnes de biodéchets et entraîné probablement l’émission de 300 000 tonnes d’équivalent CO2, on peut dire que c’est historique. Et il ne fallait probablement pas attendre d’avantage d’une telle rencontre.
Plus sérieusement, du point de vue purement politique et diplomatique, il faut reconnaître l’avancée. Les pays les plus pollueurs comme les États- Unis et la Chine et ceux qui avaient quitté le protocole de Kyoto comme le Canada ont accepté l’accord de Paris. Par là, ils reconnaissent, au moins en théorie, leur responsabilité dans le réchauffement climatique.
Cette simple prise de conscience peut être vue comme historique et même indispensable ! L’heure est maintenant à la ratification. Car oui, les 195 pays ont adopté le texte mais, pour entrer en vigueur en 2020, ce dernier devra être ratifié par au moins 55 pays, représentant au minimum 55 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Rappelons que selon les mêmes conditions, le protocole de Kyoto était entré en vigueur huit ans après sa signature…
Si les scientifiques comme les ONG saluent en grande majorité l’adoption d’un accord international, la plupart d’entre eux le juge tout de même insuffisant. Le GIEC disait : pas plus de 2°C d’ici la fin du siècle. Même pas peur ! L’accord de Paris va plus loin et appelle les signataires à limiter la hausse des températures à 1,5° C. Comment ? On verra plus tard. Pour le moment, l’ensemble de leurs engagements de réduction de gaz à effet de serre nous emmène vers un réchauffement de plus de 3° C…
« C’est l’ampleur de la fumisterie qui est historique », réagit Jean-Marie Bonnet, membre d’Attac et de la Coalition Climat Touraine. « Les procédures contraignantes envahissent les accords de libre-échange mais dans l’accord de Paris, il n’y a rien… Les petits États insulaires vont disparaître sous l’eau mais aucun pays riche ne prend d’engagement clair ni pour arrêter ça ni pour financer les dégâts. » Autrement dit, si un pays ne remplit pas les objectifs annoncés, ou pire, si ses émissions de gaz à effet de serre augmentent, aucune sanction ne sera prise contre lui.
Donc historique à certains égards, admettons ! Indispensable, probablement ! Mais au-delà de la conclusion de l’accord lui-même, l’enjeu de cette COP21 était aussi de mettre en mouvement l’humanité entière. Si un accord entre les États fixe règles et objectifs, l’accomplissement revient concrètement aux territoires où agissent citoyens, entreprises locales, associations et institutions. Sur ce plan-là et malgré l’état d’urgence, la COP21 pourrait bien marquer un tournant historique. Pendant près de 15 jours, les médias ont largement parlé environnement, des problèmes et des solutions ; les citoyens et militants se sont mobilisés : 2 300 marches pour le climat ont été organisées à travers le monde, selon le site Novethic. Et la vingtaine de Coalition climat qui s’est constituée à cette occasion devrait porter ses fruits.
En Touraine, les nombreuses associations réunies dans ce collectif se réuniront en janvier pour décider des actions à mener. Urgence à suivre…
De Jeanne Beutter
Catégories : News